Page d'accueil

L'ACTUALITÉ EN HAITI

LECTURE ET COMMENTAIRES


28 octobre 2003

 

Conférence de Régis Debray

à Port au Prince

(22 octobre 2003)

Quelques commentaires sur les propos de Debray rapportés par AlterPresse, 24 octobre 2003

L'intellectuel français, Régis Debray, invité par l'Institut Français d'Haïti, a donné une conférence à Port-au-Prince dans la soirée du 22 octobre sur « Laïcité et République »,

Debray a aussi évoqué la question de la restitution de la rançon versée par Haïti à la France au 19ème siècle pour la reconnaissance de son indépendance.

Une nombreuse assistance s'était déplacée. Malgré la pluie. Il y avait dans la salle aussi bien des universitaires que des étudiants, des journalistes, des cadres de l'administration et quelques officiels.

En présentant Régis Debray (philosophe, écrivain, conseiller politique du révolutionnaire Che Guevara et de l'ancien président français François Mitterrand), le sociologue haïtien, Laennec Hurbon, a rappelé le passage en Haïti en 1946 du père du surréalisme, André Breton. Ce dernier eut une influence considérable sur la jeunesse haïtienne qu'il enflamma par ses conférences, produisant même un chambardement politique en Haïti.

« Soyons modestes », a rétorqué Régis Debray. « Je ne suis pas André Breton… ». Régis Debray a précisé : « je me place dans le cas français, pas dans le cas haïtien »,

Dans sa démarche de caractérisation de la République, il a avancé que « la personne d'un président n'est pas sacré « Aucun parti … aucune famille ( !)… ne peuvent confisquer la souveraineté »

Avec Debray, on peut être d'accord sur ce point!

Commentaires - Mais pour ceux qui comprennent ces propos à leur façon, on peut rappeler que la personne du président n'est pas méprisable, parce qu'il est le président qu'on n'aime pas!

L'intérêt de la République peut même exiger qu'il soit recouvert d'une certaine immunité pour protéger non l'homme, mais la fonction! C'est le cas du président Chirac!

Dans un parallèle entre monarchie et république, Régis Debray a souligné que l'absence de « rois avec les armoiries et les couronnes » ne veut pas nécessairement dire qu'on est en République. « On peut trouver, à la limite, plus de dictateurs parmi les présidents élus que parmi des souverains constitutionnels ».

Selon Regis Debray, la démocratie est un élément essentiel de la république. « La démocratie c'est quand la minorité garde tous ses droits d'expression et d'organisation ». C'est quand « aucun parti, aucun clan, aucune famille ( !), aucune ethnie ne peuvent confisquer la souveraineté ».

Commentaires - Mais aussi quand aucun parti, aucun clan, aucune famille, ne s'autorisent à vendre la souveraineté à l'étranger, au nom de la démocratie.

En république, a poursuivi Régis Debray, la division du pouvoir (Exécutif, Législatif, Judiciaire) est nécessaire et doit être « réel », car « tout pouvoir tente à l'excès ». Le pouvoir absolu rend absolument fou… « souvent paranoïaque, mégalomane, etc. » « Un républicain ne se prend ni pour dieu, ni pour le prophète… »

Commentaires - Laennec avait donc tort en 1990 d'enseigner à ses lecteurs que Aristide (Titid disait-il) était un prophète. S'il avait compris que cet homme était seulement un président élu, on ne verrait pas aujourd'hui cette métamorphose de l'adoration en haine.

Sur l'État et le gouvernement, en République, « l'administration est subordonnée au pouvoir politique, mais en échange, le pouvoir politique du moment doit respecter les opinions privées des membres de l'administration ».

Sur le gouvernement et le peuple : « le gouvernement est par nature précaire et révocable. Il n'y a que le peuple qui soit irrévocable ». Attention : « le peuple, ce n'est pas la population, mais ce n'est pas non plus la populace ».Cette dernière, précise Debray, « ne connaît que la loi de lynch, qui consiste à traquer le bouc émissaire pour le pendre haut et court, alors que le peuple, c'est celui qui délibère… ».

Commentaires- Délibérer n'est pas intoxiquer par une utilisation pernicieuse des medias.

En ce qui concerne la laïcité, Régis Debray l'a cernée dans la séparation Église / État, privé / public. C'est un principe qui traverse toutes les sphères de la société républicaine, de l'école à l'administration de l'État, ce qui fait que « la liberté de conscience ne peut pas dépendre d'un homme, d'un tout-puissant, d'un parti, ni même d'une cour de justice ».

A la fin de l'exposé, un bref échange s'est installé entre Régis Debray et Laennec Hurbon, qui, entre autre, a posé la question à savoir : qu'est-ce qui se passe quand l'État viole ses propres lois ?

« Je comprends mal votre question, parce qu'en République, l'Etat est garant de l'exercice des libertés individuelles, par exemple la liberté de manifester ». « Moi, je veux manifester dans la rue, pour l'avortement, contre l'avortement… je vais voir le commissaire de police, on organise un plan de la manifestation, et lui, il va empêcher qu'il y ait des contre-manifestants qui viennent heurter l'expression de ma libre opinion… »

Commentaires - Cela dépend de la gravité des antagonismes dans la société et de leur nature! On a vu souvent en France des affrontements de rue terribles (1934, 1962, 1968) , comparées auxquels les course-poursuites haïtiennes actuelles sont des jeux d'enfants.

« Je ne veux pas du tout entrer dans des débats politiques qui m'échappent » a précisé l'intellectuel français!

Commentaires - C'est bien là le fond du problème!

A propos de la restitution et de l'héritage colonial. La question de la restitution renvoie justement à la rançon exigée à Haïti par Charles X en 1825. « Si nous devions aujourd'hui en 2003 être comptables de tout ce qui peut s'être passé depuis la naissance d'un État français (6ème siècle) ça nous mènerait loin ».

Cependant Régis Debray a ajouté que « la question de la restitution est un problème sérieux, qui doit être examiné juridiquement, historiquement ». A propos d'une évocation de l'héritage colonial, l'intellectuel français a déclaré : « si les autorités de la République ont décidé qu'il était nécessaire de confier à une commission le soin de réparer une certaine dette morale que nous avons envers Haïti, c'est la preuve que la République est consciente de ce passé colonial ».

Régis Debray a terminé en précisant que le Comité français de réflexion et de proposition sur les relations franco-haïtiennes se rassemblera en Haïti, en décembre et janvier prochains, avec tous les secteurs d'opinion haïtiens.


22 octobre 2003

 

RÉGIS DEBRAY ARRIVE EN HAITI AU PLUS FORT

D'UNE CAMPAGNE FRANCAISE DE PRESSE

CONTRE LE GOUVERNEMENT HAITIEN

 

Depuis le 6 octobre, le journal français Le Monde a publié une série d'articles assassins contre le gouvernement haïtien. Le correspondant du journal dans la région, Jean-Michel Caroit, porte aux nues la classe politicienne haïtienne, élevée au rang de parangon de la démocratie, tandis que le président élu et son gouvernement sont présentés à l'opinion française sous le jour le plus noir.

Caroit a collecté le fiel des ennemis d'Aristide qu'il déverse à l'opinion française pour de l'information sur Haïti. On rechercherait en vain la moindre phrase qui rappellerait que Aristide est un leader haïtien dont le crime est d'avoir gagné les élections contre une opposition qui tarde à faire ses preuves autrement que par l'obstruction.

Caroit relate toutes les violences illégales comme une juste résistance contre un gouvernement nécessairement responsable de tous les crimes générés par une société désorganisée, livrée à elle-même, rongée par la misère, le crime et des sanctions économiques internationales insensées.

ABAISSEMEMT DE L'ETAT HAITIEN

L'Etat haïtien s'est effondré avec la chûte de la dictature de Duvalier. Depuis, 1986, le pays a subi plusieurs régimes militaires, des coups d'Etat sanglants, des sanctions économiques internationales insensées. Cet abaissement de l'Etat haïtien crée les conditions propices à l'explosion de toutes les dérives, mais sûrement pas à l'éclosion de la démocratie.

Caroit se délecte de toute la littérature manichéenne présentant une catégorie des Haïtiens comme de méchants sauvages et les autres comme des gens bien de notre monde. Pour lui, la démocratie en Haïti reviendrait à éliminer ces méchants venus d'ailleurs, à commencer par cet emmerdeur d'Aristide, pour les remplacer par les gentils amis.

C'est pourquoi, Caroit ne dit pas la vérité aux Français, à savoir que, traditionnellement, rien n'a plus de valeur pour le politicien haîtien que d'avoir, à tout prix, une sinécure lucrative et de la garder par n'importe quels moyens. Au sein de l'Etat ou contre l'Etat, pourvu qu'il soit grassement rétribué par le trésor ou par les subsides de l'étranger.

Il n'y a pas de démocrates en Haïti. La démocratie est trop précieuse pour être confiée à de simples manouvriers de la politique. Elle doit être édifiée pas à pas à l'ombre d'un Etat de droit stabilisé.

En n'apportant pas une information équilibrée au public français, sur la réalité haïtienne, ce journaliste creuse l'incompréhension entre les deux peuples et les deux Etats. Pourquoi ces journalistes n'expliquent pas à leurs lecteurs que Aristide a été diabolisé dès son élection en 1990, dès qu'il a commencé d'agir en véritable chef d'Etat, et non en président de doublure?

Pourquoi Haïti s'est vu imposer des sanctions économiques prolongées, par les puissances étrangères, pour une histoire d'irrégularités soulevées par un employé de la mission de l'OEA, concernant l'élection, en 2000, de 6 ou 7 sénateurs, au premier tour, alors que ces sénateurs ont depuis longtemps accepté de démissionner pour aplanir les difficultés?

LE COMITÉ REGIS DEBRAY

Il est encore plus étonnant que des gouvernements étrangers disposant de moyens énormes d'information et de renseignements foncent tête baissée dans une croisade contre la pauvre et faible Haïti, au nom de la défense de la démocratie.

On peut comprendre que des journalistes agissent ainsi, par déformation professionnelle, pour faire monter la mayonnaise et vendre des histoires.

Mais seule une désinformation, habilement distillée, peut induire en erreur des chefs d'Etat et de gouvernement trop accaparés par des dossiers autrement plus importants, pour avoir le temps de se plonger dans le bouillon de culture haïtien.

C'est pourquoi l'initiative de Dominique de Villepin, Ministre des affaires étrangères de la République française, devrait intéresser tous les amis des relations franco-haïtiennes.

Il a confié au philosophe Régis Debray la présidence d'un "comité de réflexion sur les relations franco-haitiennes".

Régis Debray , est arrivé , le samedi 18 octobre 2003 , dans la capitale haitienne dans le cadre d’une visite de trois (3) jours.

Le comité comprend:

l'historienne Myriam Cottias, le philosophe Jacky Dahomay, Le Père dominicain Gilles Danroc, le PDG de la Banque des Antilles françaises Serge Robert, l'ancien ambassadeur Philippe Selz, un représentant de l'association Les Anneaux de la Mémoire (Nantes), JeanMarc Masseaux, l'historien Marcel Dorigny, le sociologue Gérard Barthélemy, et François Blancpain.

Ce sont des personnes tout à fait à la hauteur de cette mission. Certaines sont de véritables amis d'Haïti.

Souhaitons leur Honnêteté et Courage intellectuels dans l'accomplissement de cette noble mission!


21 septembre 2003

 

ORGANISER DES ÉLECTIONS POUR ÉVITER

LE VIDE INSTITUTIONNEL EN 2004

 

D'après l'AHP, 15 septembre 2003, le président Jean Bertrand Aristide a critiqué la position consistant à retarder le processus électoral sous différents prétextes. Le chef de l'Etat a réitéré la volonté de l'Exécutif d'organiser de nouvelles législatives, avant la fin de l'année 2003, pour éviter tout vide institutionnel au pays.

Il a souligné quelques dossiers qui lui paraissent urgents pour assurer le fonctionnement de l'Etat. Il a soutenu sans équivoque la proposition d'amendement de la constitution par la 47è législature. Jean Bertrand Aristide appelle la population à aller voter lors des prochaines joutes électorales afin que la 48è législature puisse ratifier, a-t-il dit, cette proposition d'amendement dans l'intérêt du pays.

M. Aristide a critiqué l'embargo économique maintenu par la communauté internationale qui bloque l'aide au pays. Le président dit espérer qu'avec la prochaine législature cette situation aura évolué et que le pays sortira enfin de la crise.

Le président retient la question de l'amendement de la Constitution de 1987 comme étant l'un des thèmes qui sera débattu durant les prochaines campagnes électorales.

Il s'est félicité de l'initiation du processus devant aboutir à la régularisation constitutionnelle de l'abolition des ex-Forces Armées d'Haïti. Il a félicité les parlementaires de la 47e législature pour avoir travaillé en ce sens.

Le président a considéré, dans son intervention, que la régularisation de la question de la double nationalité, comme une réparation due aux ressortissants du pays, vivant en terre étrangère. Il a dit que la reconnaissance de la double nationalité des Haïtiens d'origine expatriés va encourager davantage cette fraction de la Nation à injecter des ressources dans l’économie nationale. Sa contribution est déjà considérable (600 à 800 millions de dollars) chaque année.

Un Conseil Electoral Provisoire de consensus devait permettre de normaliser le pays par le moyen des élections. Mais le consensus s'est révélé irréalisable dans l'état actuel de la culture politique en Haïti.

Faut-il renoncer à consolider les institutions de l'Etat par des élections démocratiques et laisser prendre le pouvoir par la force?

Faut-il se lancer dans des expérimentations chimériques extra-constitutionnelles pour complaire à toutes sortes de commis voyageurs du nouvel "impérialisme démocratique" qui sème la misère et le chaos sur son passage, à cause de son ignorance du "fonctionnement" des autres hommes de la planète? Ces gens exigent de l'Etat haïtien d'être "illico" le modèle démocratique introuvable, au lieu d'accompagner cette malheureuse nation à remonter progressivement des enfers. Ces gens imbus de leur "supériorité" n'écoutent même pas les avis de ceux de leurs compatriotes qui se sont donnés la peine d'approcher "humainement" les gens du pays pour essayer de comprendre leurs vrais problèmes.

Faut-il poser un acte de souveraineté, à la veille du bicentenaire d'une indépendance arrachée dans le feu des batailles, en défiant les nouvelles chaines? Faut-il au contraire que, face aux menaces et aux subsides extérieurs, tout le monde laisse pourrir le pays et mourir le peuple, pourvu que les privilèges personnels soient garantis?

Personne ne peut répondre à ces interrogations! La seule chose sûre c'est que les victimes resteront les mêmes et qu'elles ne le supporteront pas éternellement.

retour au sommaire